Les mercredi 24, jeudi 25 et vendredi 26 février 2021, nous avons pris les 10 premières doubles photos pour Break-Out, une initiative artistique engagée d'Elisabeth Falleyn & Emanuel Maes. Break-Out veut réagir au sujet des polémiques récentes à propos, entre autres, de Kaat Bollen et Tara Gins. Le 8 mars, Journée internationale de la femme, nous les avons mises en lumière.
break out
Quand j'ai lu ce qui était reproché à Kaat Bollen et Tara Gins «au nom de l'honneur de la profession», j’en ai eu des frissons. Nous sommes en 2021. Les femmes ont désormais le droit de vote depuis plus d'un demi-siècle (1948). Nous pouvons faire toutes les études que nous voulons (merci Marie Popelin). On peut consciemment choisir de devenir mère ou pas du tout (merci pour la pilule dans le cadre de l'émancipation). Et pourtant, il y a une partie de la société qui s'accroche toujours à de vieux principes.
Une femme ne peut être digne de confiance que si elle n'est pas trop féminine et sexy. Sexy et intelligente ne sont pas compatibles. Les hommes veulent "une lady dans la rue mais une tigresse dans le lit". Eh bien, c'est peut-être le prochain combat important à mener : la lutte pour être qui nous voulons être. Pas ce qu’impose la société, pas ce que pensent les voisins. Les femmes comme Kaat Bollen et Tara Gins défendent ce choix, qu'il convient de mettre à juste titre sous les projecteurs. Pourquoi est-ce important pour moi?
Il y a quelques années, je me suis promis de ne pas adhérer à ces exigences sociales tacites qui ne me rendent pas heureuse. Alors pourquoi devrais-je les suivre? Je ne blesse personne en étant moi-même. J'ai la chance d'avoir ma propre entreprise et de ne pas avoir à me plier aux demandes d'un employeur ou d'un comité. Je peux décider moi-même comment je m'habille, sans me faire réprimander par un supérieur hiérarchique. Mais tant d'autres femmes n'ont pas cette chance. C’est pour ça. C'est pour ça que j’ai mis sur pied ce projet.
Elisabeth Falleyn, initiatrice
photographie libératrice
Il y a trois ans, moi aussi, en tant qu'homme, je restais campé sur mes positions. Cela se passait bien, j’avais mes idées et mon expérience de l’apparence physique. Ce fut le début d'une recherche intense sur le rôle et la relation avec son propre corps. Des dizaines d'hommes et de femmes se sont retrouvés devant mon objectif, des amis ou de parfaits inconnus, ce qui débouchait sur de longues conversations, souvent émotionnelles, des conversations ouvertes, nues et douloureusement honnêtes. Les raisons pour lesquelles les gens veulent montrer et voir leur corps se sont avérées très différentes mais à chaque fois légitimes et importantes.
Certains luttent contre les idéaux, certains luttent contre la douleur. D'autres se sont dévoilés avec une grande fierté, car cela représentait pour eux un acte de résistance contre l'hypocrisie du monde (en ligne), ou contre soi-même. En résumé : peurs et acceptation. Il y avait des cicatrices qui ne voyaient jamais le jour, des proportions qui faisaient honte, des rituels qui devaient être accomplis comme thérapie. Mais aussi des gens qui voulaient juste une photo d'eux-mêmes, prise à travers l'œil d'un étranger. Il y avait aussi de la frustration devant moi, profondément enracinée dans un corps qui n'était ni compris ni accepté par les partenaires. Ce que cette expérience m'a appris : Chacun vit en guerre contre son propre corps et j'ai appris à aimer chacun d'entre eux. Par la suite, de nombreux messages m'ont appris à quel point ce processus peut être libérateur.
Break-Out résonne profondément en moi et quand Elisabeth m'a demandé de coopérer, je n’ai pas hésité une seule seconde. Je suis resté incompréhensif et incrédule face aux histoires de Kaat Bollen et Tara Gins. Le paternalisme et la terrible autorité autoproclamée des hommes mais aussi des femmes qui jugent me rendent à chaque fois triste, en colère et même décontenancé. Au nom de Dieu, mais d'un dieu ancré au plus profond de leurs pensées. Ma résistance est grande. Est-ce une croyance absolue en l'égalité? Un grand besoin de liberté dans un monde déjà faussé? Une prise de conscience de la perte de connexion avec notre corps naturel? Les questions font partie de la recherche. C'est une déclaration de toute façon.
Emanuel Maes, je photographie
The human body is the best picture of the human soul.
Ludwig Wittgenstein
le côté pratique
C'est un projet en devenir. Nous avons d'abord demandé à un petit groupe d'intimes de participer et leur avons donné les consignes suivantes :
«Nous prenons deux photos de votre corps, de la tête aux pieds: une habillée et une nue. Vous choisissez vos propres vêtements. Vous choisissez de rester ou de sortir de votre zone de confort. Il faut être complètement nu, mais vous être libre couvrir des parties du corps avec vos mains, sous-vêtements ou accessoires que vous apportez vous-même. L’essentiel est le jeu de miroir entre les deux photos. Je suis l’un et je suis l’autre aussi. »
Le premier objectif est de donner un forum aux photos sur notre site, c’est la ligne de départ de notre projet. Une exposition suivra plus tard. Mais la publicité en 2021 est difficile sans les réseaux sociaux. Nous y serons volontiers présents, même si ces plateformes en ligne sont critiquées pour leur double morale. Des jeunes filles montrant leur corps de tous les côtés avec un minimum de tissu sans réfléchir. C’est possible. C'est permis. Mais la pureté de notre corps reste tabou, même si à un jet de pierres, les sites pornographiques bousculent notre vie relationnelle.